La truffe : le pari du champignon

Noël : son sapin, ses décorations, ses cadeaux, sa neige (de moins en moins), ses repas sans fin. Repas qui sont l’occasion de déguster des mets parfois rares. Parmi ceux-ci : la truffe. La truffe est un champignon qui pousse sous la terre sans racine ni attaches. Elle vit en symbiose avec l’arbre souvent un chêne truffier sous lequel elle se développe. Pour vous faire découvrir ce sujet, Étonnante Époque a décidé de se transformer en coach et en conseiller patrimonial pour vous donner dix bonnes raisons de vous lancer dans le diamant noir et de devenir trufficulteur

1) Parce que, truffes noires ou truffes blanches, la demande est dix fois supérieure à l’offre

D’un point de vue marketing, pas besoin d’imaginer des plans trop sophistiqués. La production mondiale de la Melanosporum culmine à 100 tonnes par an, alors qu’elle était de plus de 1000 tonnes pour la seule production française il y a cent ans. Donc le potentiel est là. De plus, les prix de transaction sont très corrects : à la Maison de la Truffe à Paris ou sur un marché aux truffes, le kilogramme de truffe du Périgord s’achète entre deux et trois mille euros. 

Les records restent l’apanage de la collègue italienne, la truffe blanche d’Alba ou truffe du Piémont qui se négocie entre cinq et sept mille euros le kilo. Pour se donner un ordre de grandeur, une truffière mature donne un peu plus de cinq kilos par hectare. On appréciera également la truffe de Bourgogne. 

2) Parce que la truffe c’est bio et même vegan

Forcément bio car les truffières ne subissent aucun traitement chimique (on ne va pas mettre un fongicide sur un champignon). Et le bio a clairement le vent en poupe. Vous pouvez même positionner le produit comme vegan. Il y a peu de produits qui peuvent se vanter de mettre d’accord tous les courants de consommateurs.

3) Parce que, avec la trufficulture, vous allez avoir un métier qui a du sens

Fini les PowerPoint à produire en urgence pour votre chef pour la prochaine réunion, fini les fameux bullshit jobs que décrit David Graeben. Si vous êtes un candidat au changement de vie, c’est le métier idéal pour vous. En plus vous ne travaillerez que quatre mois, car la récolte a lieu entre décembre et mars. Un petit peu d’entretien de la truffière entre temps, vous allez pouvoir en profiter pour devenir runner, champion de trail et tenter l’Ultra Trail du Mont-Blanc (par exemple)

4) Parce que la truffe a un goût assez unique à déguster… notamment avec le foie gras 

Tous ceux qui en ont goûté vous le diront, le parfum, les arômes et le goût d’humus et de musc de la truffe noire du Périgord sont extraordinaires. Un petit toast tartiné au beurre truffé ou un bien un brillat savarin truffé ne manqueront pas de flatter votre palais. A moins que vous ne préfériez l’omelette aux truffes ou la soupe aux truffes VGE de Paul Bocuse

5) Parce que ce sera l’occasion d’adopter un chien truffier… ou un cochon truffier pour en trouver 

En effet, pour trouver les truffes, le flair du trufficulteur ne suffit pas. Il peut s’en remettre à certaines mouchettes qui se concentrent au-dessus de l’endroit où est la truffe. Pas forcément la méthode idéale en terme de productivité. Le cochon constitue une alternative intéressante, en plus vous pouvez le manger quand Noël arrive. A l’inverse, attention il a une légère tendance à manger les truffes qu’il trouve. 

L’assistant idéal pour débusquer le champignon au pied des chênes truffiers reste donc le chien. Certaines espèces de chien d’eau italiens (lagotto romagnolo) ou espagnols sont d’excellents chiens de travail, en plus d’être de fidèles compagnons qui adorent les enfants.

6) Parce que c’est classe de recevoir ses amis et de leur servir vos propres « champignons »

« Tu les a trouvées chez ton boucher ? », « Non, non ça vient de ma truffière ». A l’heure où l’on privilégie les filières courtes et le lien direct avec le producteur, c’est simple mais toujours efficace.

7) Parce que, pour une fois, le réchauffement climatique vous laisse un peu de répit

Les différentes études sur l’évolution du climat montrent en effet que le climat dans les zones traditionnelles de culture de la truffe va devenir de plus en plus sec. A l’image des vignes qui se développent en Angleterre, les zones de culture vont monter de plus en plus au nord. Si vous êtes parisien, vous pourriez même ne pas avoir à déménager, car on a récemment trouvé des truffes noires sauvages en forêt de Rambouillet ou au Bois de Vincennes.

8) Parce que voilà un domaine où la récolte en Chine ne va pas vous concurrencer avec ses prix bas

Même si la Chine produit désormais 300 tonnes par an, la truffe chinoise, Tuber Indicum, n’a aucune saveur ! Elle a la forme de la truffe noire, mais aucun goût. Le Canada Dry de la truffe en somme.

9) Parce que la truffe serait aphrodisiaque

Si c’est François Ier qui a introduit la truffe à la Cour après des siècles où elle a souffert de mauvaise réputation (imaginez, on la considérait comme une œuvre de Satan !), c’est le grand Louis XIV qui en a fait un produit de luxe. Tandis que Madame de Montespan en vantait les vertus sur la libido de son royal amant. Une tradition que reprendra d’ailleurs Madame de Pompadour quelques années après. Après le Viagra, la corne de rhinocéros, voici le premier aphrodisiaque naturel et qui ne décime pas des animaux protégés.

10) Parce que l’Union Européenne et l’INRA sont prêts à se lancer dans l’aventure de la truffe

L’Espagne l’a bien compris : important de la Melanosporum française, les espagnols ont planté grâce aux aides de la Politique Agricole Commune des milliers d’hectare de truffière et produisent désormais la même quantité que la France.  Comme pour le rosé, les espagnols sont devenus nos principaux concurrents. En France, l’INRA est prête à aider les trufficulteurs à mettre en place des systèmes d’arrosage des truffières afin de garantir une meilleure production et d’éviter les conséquences de trop nombreuses sécheresses. Des tests ont eu lieu en Charente et se révèlent très prometteurs.

Comme on vous l’a dit en introduction, la truffe c’est le business de l’avenir. Une opportunité énorme d’investissement. En revanche, les truffières commencent à produire en moyenne au bout de dix ans. Finalement ce sera plutôt pour votre retraite, un peu comme ces parts de SCPI que ce conseiller en patrimoine a encore essayé de vous revendre il y a peu. Ayez du nez, suivez le bon investissement : la truffe.

Mise à jour du 10/01/2020 : une truffe de 850 grammes vendue 2600€

Comme pour les diamants, il y a les petits et les gros diamants. Un trufficulteur de Saint Paul de Vence a eu le bonheur de trouver un diamant noir de 850 grammes fin décembre. Joli cadeau de Noël, cette truffe géante a été adjugée 2600€ aux enchères. Quand on vous dit que la truffe est un excellent placement!!!

Mise à jour du 15/09/2020 : l’incroyable patience du trufficulteur

En vacances dans le Périgord, nous avons visité une truffière. Nous avons pu alors constater que Jules Gaîté auteur de cet article avait fait preuve d’un certain optimisme dans son article. Dans la vraie vie, tout n’est pas si simple. Tout a commencé dans les années 70 avec une révolution technologique.  L’INRA a développé la technique dite du plant mycorhisé par le champignon de la truffe. 

Cette technique consiste à faire grandir des plantules dans un substrat naturel contenant notamment des spores de truffe qui vont coloniser les racines pour former la mycorhize, l’association entre l’arbre et le champignon de la truffe. Ca n’est ainsi plus le seul hasard de la nature qui va décider si ces futurs arbres vont à terme donner de la truffe. Nos trufficulteurs se sont jetés sur cette technique dans les années 80. 10 ans après, ils constatèrent malheureusement que la mycorhization n’avait fonctionné que dans moins de 5% des cas et durent arracher plus de 20.000 arbres.  

Depuis la maîtrise de la technique a progressé. Mais savoir si un chêne truffier va « donner » ou non, demeure aléatoire. La taille année après année doit être parfaite pour que les racines se développent harmonieusement. L’arrosage est aussi critique. Et le verdict ne tombe qu’après 8 à 10 ans avec bonnes ou mauvaises surprises. La truffe un investissement sur le temps long qui garde sa part de mystère et donc de poésie, un vrai métier de passionnés.  

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