Il pleut, il pleut bergère

Un blog, c’est fait pour parler de la pluie et du beau temps. Alors parlons de la pluie et de comment elle m’a fait redécouvrir le Spleen de Baudelaire ! J’étais la semaine dernière à Brest. Mes interlocuteurs brestois me disent : « on n’en peut plus de la pluie. Il n’arrête pas de pleuvoir depuis mi-novembre ». Je suis resté scotché. Les Brestois, les champions du monde du crachin avec les Irlandais… c’est comme si un italien faisait une indigestion de spaghettis et ou un russe de vodka.

C’est vrai, le temps est particulièrement pourri depuis plusieurs semaines. Malgré le réchauffement climatique, il pleut, il neige, il vente. L’heure d’hiver porte bien son nom. Les cumuls de précipitations sont battus dans plusieurs régions et les inondations débutent. Mais, si on y regarde de plus près, rien d’extraordinaire dans cet épisode, on est bien loin des pluies diluviennes (du latin diluvium qui signifie déluge  – maintenant vous aussi vous savez). C’est tout simplement l’hiver… et il pleut. Même les meilleurs prévisionnistes économiques, qui se trompent avec régularité, auraient pu l’anticiper.

Le fait marquant dans cet épisode est le déficit exceptionnel de luminosité : le soleil se cache. La Voix du Nord titrait le 14 janvier : « il est mort le soleil », dénombrant 1h42 de présence de l’astre lors de la 1ère quinzaine de janvier dans les Hauts de France. Du coup, ça cause flotte et nuages à la machine à café et le moral des Français pourtant en plein rebond macronien en prend un coup. Seuls les gourous de la luminothérapie exultent.

Heureusement, la poésie vient à ma rescousse. Je n’avais pas relu ce texte « Spleen de Baudelaire » depuis longtemps, la rédaction de cet article m’a permis de le redécouvrir.

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l’horizon embrassant tout le cercle
Il nous fait un jour noir plus triste que les nuits ;

Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l’Espérance, comme une chauve-souris,
S’en va battant les murs de son aile timide,
Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

Quand la pluie étalant ses immenses traînées
D’une vaste prison imite les barreaux,
Et qu’un peuple muet d’horribles araignées
Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

Des cloches tout-à-coup sautent avec furie
Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
Ainsi que des esprits errants et sans patrie
Qui se mettent à geindre opiniâtrement.

Et d’anciens corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; et, l’Espoir
Pleurant comme un vaincu, l’Angoisse despotique
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir

Paradoxalement, la force de ce terrible « Spleen de Baudelaire » a plutôt agi sur moi comme un chasse-spleen. Je terminerai donc sur un bon mot. La pluie, la pluie, personne ne devrait être surpris. Nous avons élu Jupiter, pas le Roi Soleil. Il ne manque plus que les éclairs.

Commentaires (1)
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  • 75fabienne

    Merci pour ce moment de poésie, parce qu’il fait encore gris !