Johnnymania

Je ne me suis pas précipité pour écrire cet article à la mort de Johnny. Je ne voulais pas écrire, sujet trop évident, trop banal, trop commenté. Mais sa musique trotte dans ma tête comme dans celle des Français depuis une semaine. Alors je m’y attaque mais je vous préviens, cet article sera mélancolique, à l’image de ce terne après-midi d’hiver « quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle. »

Les média nous ont abreuvé de son immense carrière, un voyage à travers la France des cinquante dernières années, de l’émotion en « tubes ». Personne ne pouvait rester indifférent tant sa musique nous a accompagnés. Phrase entendue communément « Jean d’Ormesson a bien fait de mourir la veille sinon personne n’en n’aurait parlé ». Ça a tourné en boucle : les chansons, les concerts et puis la page people avec les femmes de sa vie. Quel client posthume ce Johnny.

J’étais comme tout le monde, triste mais pas bouleversé. Pourquoi cette relative indifférence ? Tout est dans ce nom « Johnny Hallyday ». Un nom qui sonne bien, qui claque mais en même temps le produit du marketing de l’époque où il fallait faire américain. C’est un peu l’histoire de Johnny, l’histoire d’un type ordinaire au talent scénique extraordinaire. Johnny a passé sa vie à se faire exploiter par son entourage. Il a cultivé avec excès les stéréotypes du macho viril : des motos aux faciles conquêtes féminines à gogo. On disait que la somme de son âge et celui de sa compagne était une constante. L’alcool, la drogue, il a tout essayé sans modération,y compris face à son public. Dans les années 90, on a fini par se moquer avec la fameuse boîte à coucous des Guignols. Les hommages unanimes oublient ces railleries. Dans les années 2000, le mythe a triomphé.

Johnny, c’est l’histoire d’un type ordinaire au talent scénique extraordinaire. Une bête de scène au sens propre. Alors, comment gérer ce grand écart entre le génie de l’interprète et la banalité de l’homme. C’est tout le drame de Johnny, c’est aussi ce qui a fait sa popularité. C’est ce qui fait ma mélancolie du jour.

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